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Paris, 15h30, dans la salle d'attente d'un centre de radiologie quelque part dans le XIIème arrondissement de la capitale.
Pfff...Voilà déjà une demie heure que je me morfonds dans cette satané salle d'attente. Les lectures proposées dans ce genre d'endroits ont toujours eu le chic de me faire sourire. Un numéro du "Nouvel Obs" dont la une est consacrée au bug de l'an 2000...Plus loin, en feuilletant les pages, j'apprends "la folie des comédies musicales" qui cartonnent un peu partout en France avec notamment la troupe encore méconnue de "Roméo et Juliette" ainsi que des "Dix Commandements". Je referme ledit magazine avec la chanson "Aimer" en tête et décide du coup d'allumer mon iPod.

" L'Hopital Henri Mondor vous informe que votre candidature pour un RCA (remplacement de congé annuel) a retenu toute notre attention et vous informe de votre prise de poste pour le mois de Juin 2010 en crèche. Pour ce faire, vous devez avoir effectué une radio pulmonaire et une intradermo de moins de trois mois."

Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour se faire un peu de sous pour l'été ma pôv' Lucette. Bon, ça commence à bien faire, voilà déjà trois quarts d'heure que je poirote...Quand soudain :
- Mademoiselle Vanessa Muhlheim? Mademoiselle Vanessa Muhlheim ?! MADEMOISELLE VANESSA MUHLHEIM !
- Ouiouiouioui c'est môa..! (foutu iPod)
- Bonjour Mademoiselle, veuillez me suivre. Dixit le bellâtre qui me servait de Docteur.
- Je vous suis.
Docteur Mamour me montre une cabine du doigt.
- Voici la cabine où vous vous changerez. Me dit-il avec son sourire colgate.
- Me...changer?
- Tout à fait, vous vous mettez torse-nue et vous empruntez l'autre porte qui mène à la salle de radio.
- Torse...nu? Vous voulez dire torse-nu comment? Comme dans "torse" et dans "nu" ou...?
- Oui, torse-nu. Complètement. A tout de suite.
- ...

Je m'exécute. Je rentre dans la cabine et enlève mon haut à contre coeur. Ce n'est pas tant que je sois extrêmement pudique, mais l'exhibition ne fait pas partie de mes hobby, encore moins lorsqu'il s'agit d'un jeune Dr à peine plus âgé que moi. Assez casse-gueule  tout de même ce système de cabines à deux portes, une donnant sur la salle d'attente et une autre sur la salle de radio, t'as pas intérêt à te tromper de portes quand tu sors . Je prends mon courage à deux mains et je suis sur le point d'ouvrir la porte, prête à me faire radiographier les poumons par Docteur-j'ai-eu-mon-diplôme-de-médecin-dans-une-boîte-de-chocapic-et-je-me-la-raconte-parceque-chus-trop-beau-gosse-et-j'ai-choisi-la-radiologie-pour-reluquer-les-nanas. Mon portable sonne. Mon père m'annonce que je suis tata d'une petite Noëmie.! Je jubile et sautille dans la cabine en poussant des petits cris de joie puis raccroche rapidement me rappelant ce pour quoi j'étais à moitié nue dans un endroit qui n'était pas ma chambre. Je saisi la poignée, la tourne, et la pousse tout en retenant mon souffle.

Et là, c'est le drame. Mon regard croise alors celui d'un vieux monsieur, assis sereinement, accompagné de ce qui devait être son fils. Une dizaine de tête se tournent alors en ma direction, tous me fixent et certains esquissent un sourire.
Félicitations cocotte, tu t'es gourée de porte.

Je referme alors violemment la porte d'un coup sec. Bravo ma fille, déjà que c'était dur de se mettre à moitié nue devant UN Docteur, mais il a fallut que t'en fasse profiter la salle d'attente entière. La honte. On toque à la porte. L'autre porte. Celle que j'aurai du emprunter. Vous savez celle qui donne dans la salle de radio et non sur la salle d'attente improvisée en scène du Moulin Rouge. La pâle imitation Leader Price du Dr Ross ouvre la porte sans même avoir attendu une réponse de ma part. (goujat!)

- Tout se passe comme vous voulez? Me demande l'Homme-Dentifrice.
- Non. Oui. Oui.
- Vous portez des chaînes ou des colliers autour du coup?
- Oui deux, j'enlève?
- Non pas la peine, vous pouvez les mettre dans votre bouche.
- ?
Il sourit.
- Dans ma bouche?
- Oui dans votre bouche, du moment qu'elles n'apparaissent pas dans le champ de la radio.
Encore une fois je m'exécute et pénètre dans la salle de radio. Et à ce moment précis, à cet instant là, je suis ridicule. Je viens de m'exhiber devant une douzaine de personne et maintenant je suis torse nue devant  mon bourreau  et je mâche mes chaînes. Puis :
- Puis-je savoir la raison de cette radiographie Mademoiselle? Me demande-t-il
- Mrrfff mrrfff

A croire qu'il avait fait exprès de me poser la question après que j'eusse foutu ces foutues colliers dans ma bouche. Il est même pas beau en vrai.

Après la radio, je retourne me rhabiller dans la cabine. Partagée entre la honte et la honte. "Enfin terminé". J'hésite longuement à sortir. Je saisi enfin la poignée, la tourne et la pousse. Le vieux monsieur est toujours là, son fils et la dizaine de personnes présentes ayant eu droit au spectacle gratuit également. Je leur souri, gênée, embarrassée. A ma grande surprise ai même eu droit à quelques applaudissements et  à un "bis! " de la part du vieux monsieur. Ayant subi la honte de ma vie, je n'ai plus qu'à jouer le jeu, au point où j'en suis. Je me retourne vers eux et leur offre ma plus jolie révérence de spectacle apprise lors de l'atelier théâtre au lycée.
 
 

Et je m'éloigne la tête haute, sans jamais me retourner.


Moralité : Les séries télé telles que "Grey's Anatomy", "Urgences", "Dr House"  et "Scrubs" conditionnent beaucoup trop notre sens rationnel de l'esthétisme vis-à-vis des Médecins en blouse blanche. (Tout comme Walt Disney conditionne beaucoup trop les filles dès leur plus jeune âge sur l'existence du prince charmant, mais ça c'est une autre histoire)